Pourquoi le sucre est-il devenu notre ennemi public n°1 ?

Pourquoi le sucre est-il devenu notre ennemi public n°1 ?

Pourquoi le sucre est-il devenu notre ennemi public n°1 ?

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17 janvier 2017

Chaque nouvelle année apporte son lot de « bonnes » résolutions. Peu usitées jusqu’à présent, on a vu fleurir sur les réseaux sociaux quelques résolutions du type « en 2017, j’arrête… le sucre ». Pourquoi tant de haine vis-à-vis d’un morceau de sucre ? C’est ce qu’a tenté de comprendre l’auteur d’un article paru sur Slate, que nous décodons pour vous.

« Comparé à l’alcool, la cigarette, voire à la cocaïne, le glucose est donc passé du statut d’ami des enfants à celui d’ennemi public à éradiquer »

Vrai

Nous sommes d’accord ! Il y a depuis quelques temps comme un vent de « sugarbashing », plaçant désormais le sucre en tête de liste des accusés pour nombre de nos maux de société liés à l’alimentation (obésité, diabète, addiction, etc.).

Notons au passage que l’accusé « sucre » est à géométrie variable dans l’acception du terme : sucre, glucose, fructose, sucres, sucres ajoutés ou cachés, produits sucrés, boissons sucrées et/ou jus de fruits, voire produits gras ET sucrés ou plus vague encore malbouffe…On ne sait pas toujours précisément de quoi il retourne quant à « l’assiette » de l’accusation !

Rappelons ici les définitions des sucres.

Bien souvent, le plaisir (forcément) coupable procuré par le sucre est comparé à celui de substances toxicomanogènes ou de drogues dures. Mais redisons-le ici, le sucre ou plutôt le glucose (dont l’une des sources alimentaires est le sucre) n’est pas une drogue. Les sucres empruntent certes les mêmes circuits neurologiques de la récompense mais la manière dont ils sont digérés et métabolisés n’est en rien comparable à la « consommation » des drogues. Pour en savoir plus : voir notre infographie Sucre et Addiction.

Pour donner un ordre de grandeur et ramener à la raison, les sucres ajoutés à l’alimentation (principalement le sucre de betterave et de canne) contribuent en France à moins de 20 % des glucides alimentaires donc des sources de glucose.

Autrement dit, 80 % des sources de glucose viennent des glucides complexes (amidons des féculents par exemple) et des sucres naturellement présents. C’est entendu, le sucre a bon goût mais il a aussi bon dos quand il s’agit de trouver un coupable.

L’auteur mentionne par ailleurs le documentaire « Sucre, le doux mensonge », très à charge contre le sucre et très américain, sur lequel nous avons publié un fact-checking (sucre le doux mensonge, un documentaire qui mérite un décryptage).

« Le gouvernement lance également une campagne anti-sucre ; ce à quoi répondent les industriels du secteur avec des affiches plutôt agressives »

Faux

Il s’agit bien de nos publicités mais nous ne sommes pas d’accord pour les juger agressives.  Elles remontent à 2006 et proposaient déjà de s’interroger sur la pertinence de cibler le sucre comme coupable unique.

La signature de la campagne « Qui voudrait d’un monde interdit au sucre ? » relevait de l’adynaton, figure rhétorique faisant appel à l’absurde ou à l’improbable, chère aux surréalistes et dont l’effet recherché est l’humour et non l’agressivité. Le lecteur jugera. Il n’en reste pas moins que dix ans plus tard, ce que l’on pensait improbable est une réalité : la chasse au sucre est devenu un sport national…

Pourquoi le sucre est-il devenu notre ennemi public n°1 ?
Pourquoi le sucre est-il devenu notre ennemi public n°1 ?

« Plus que l’aliment en lui-même, c’est la quantité de glucose ingérée qui serait dangereuse pour l’être humain, pas le glucose en lui-même. »

Vrai

Cela nous semble tellement simple et tellement vrai qu’il faudrait l’ériger en mantra !

Nous sommes d’accord : le glucose ou les sources de glucose (dont le sucre) apportent des calories et sont, de ce point de vue, des contributeurs à des apports potentiellement excessifs. D’autant que les sucres ajoutés sont présents dans des produits « palatables » (très bons au goût) et pour certains denses en calories. Pour limiter les excès, les pistes sont aujourd’hui connues : manger varié, choisir les portions adaptées, réduire la fréquence des produits trop gras et trop sucrés.

C’est bien la quantité de glucose consommée qui fait la différence, et non le glucose en lui-même.

« L’Australie, pays dans lequel la consommation de sucre a baissé de 16%, mais où l’obésité a triplé. Pourtant, l’obsession demeure »

Vrai

C’est à ce point étonnant que les scientifiques qui ont fait ce constat en 2011  ont parlé de « paradoxe australien » à l’instar du fameux paradoxe français (contradiction apparente entre nos consommations élevées en matières grasses, en vin et notre bonne santé cardiovasculaire). La prévalence de l’obésité a été multiplié par 3 depuis les années 80 en Australie tandis que la consommation de sucres ajoutés y diminuait de 16 %.

Sur la même période, les apports en sucres ajoutés ont baissé de 5% au Royaume-Uni, augmenté de 23% aux Etats-Unis et apparaissent stables voire à la baisse en France, tandis que la prévalence de l’obésité augmentait nettement dans tous les pays.

Conclusion : à l’échelle des populations, les apports en sucres ajoutés ne semblent pas de bons marqueurs de la prévalence de l’obésité ni de son évolution.

« On pourrait aussi se demander si cette chasse au sucre n’est pas due à une quête contemporaine de l’apparence et de la santé parfaites »

Vrai

Chère au politologue Lucien Sfez, une certaine utopie de la santé parfaite imprègne fortement les prises de position sur l’alimentation contemporaine(voir à ce sujet l’article de M. Le Barzic).

Dans nos sociétés modernes, nous ne sommes plus guidés par la peur de manquer mais plutôt par la peur de l’excès. Et chez certains, la recherche d’un « corps parfait » passe par une « nourriture parfaite », éliminant tout aliment jugé « malsain », car trop sucré, trop gras ou tout simplement trop tentant…

Il est important de réfléchir aux moyens de lutter contre les excès de consommation et nous acceptons le débat et les controverses.

Mais nous pensons qu’il est important de rappeler (sans excès) que les plaisirs de la table, fussent-ils sucrés ou salés, ne sont pas des plaisirs coupables mais bien des alliés de notre équilibre alimentaire et social.

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